jeudi 27 novembre 2008

Le poids du passé

Je me faisais hier la réflexion suivante : en quoi un passé peut-il être plus lourd à porter qu'un autre ? Le passé nous est inaccessible ; le seul passé qui demeure vit en nos souvenirs. Quelle différence fondamentale peut-il bien exister entre des souvenirs véritables, renvoyant à des faits réels, et des souvenirs imaginaires, créés de toute pièce par l'esprit humain ? Ce ne sont, dans un cas comme dans l'autre, que des images dans notre tête et c'est d'autant plus vrai que les souvenirs "véritables" eux-mêmes sont partiellement artificiels, de par les exagérations et les oublis qui les accompagnent.

mercredi 26 novembre 2008

Pensée du jour, II

Se faire des amis est un plaisir de bourgeois, se faire des ennemis un plaisir d'aristocrate.
Henri de Montherlant

samedi 22 novembre 2008

Pensée du jour, I

L'imagination vaut bien des voyages et elle coûte moins cher.
George William Curtis, Aphorismes

vendredi 17 octobre 2008

Volonté de Dieu ou liberté humaine

Quelques réflexions à propos d'un problème qui me semble, de prime abord, impossible à résoudre... Un certain nombre de philosophies et de religions affirment l'existence d'un libre arbitre de l'homme, tout en posant d'autre part l'existence d'une volonté divine à l'œuvre à travers le monde, Dieu étant doué de prescience. De ces idées sont déduites un ensemble d'hypothèses, selon lesquelles l'histoire humaine serait dans ses grandes lignes dictée par Dieu, les "petites" étant abandonnées à la volonté de l'homme.

Tout ceci se heurte à deux difficultés. Il est inutile sinon absurde, d'abord, de supposer l'existence d'une liberté humaine limitée à l'insignifiant ; quel serait son sens ? Séparer ce qui importe de ce qui est superflu est par ailleurs strictement impossible : ce que l'on juge ou paraît secondaire influe toujours sur les grands événements, lesquels n'auraient souvent pu se produire si d'infimes détails n'eussent pas été ce qu'ils furent. En outre, si l'homme est libre face au plan de Dieu, si chacun peut s'inscrire ou non dans des voies qui seraient déjà tracées, chaque événement déterminant chaque événement et chaque homme influant ses semblables, comment notre vie pourrait être jalonnée d'épreuves et d'événements déterminés par avance ?

Si Dieu connaît par avance la vie que je dois mener, c'est qu'il possède la connaissance de tout ce qui doit se produire, c'est-à-dire de tous les événements, eux-mêmes agis par des hommes censés être libres. Ou je suis libre et tout est illusoire, ou nous n'avons tous aucune marge d'autonomie.

jeudi 28 août 2008

Soljénitsyne sur la liberté de la presse

La presse, aussi, bien sûr, jouit de la plus grande liberté. Mais pour quel usage ? (…) Quelle responsabilité s’exerce sur le journaliste, ou sur un journal, à l’encontre de son lectorat, ou de l’histoire ? S’ils ont trompé l’opinion publique en divulguant des informations erronées, ou de fausses conclusions, si même ils ont contribué à ce que des fautes soient commises au plus haut degré de l’Etat, avons-nous le souvenir d’un seul cas, où le dit journaliste ou le dit journal ait exprimé quelque regret ? Non, bien sûr, cela porterait préjudice aux ventes. De telles erreurs peut bien découler le pire pour une nation, le journaliste s’en tirera toujours. Etant donné que l’on a besoin d’une information crédible et immédiate, il devient obligatoire d’avoir recours aux conjectures, aux rumeurs, aux suppositions pour remplir les trous, et rien de tout cela ne sera jamais réfuté ; ces mensonges s’installent dans la mémoire du lecteur. Combien de jugements hâtifs, irréfléchis, superficiels et trompeurs sont ainsi émis quotidiennement, jetant le trouble chez le lecteur, et le laissant ensuite à lui-même ? La presse peut jouer le rôle d’opinion publique, ou la tromper. De la sorte, on verra des terroristes peints sous les traits de héros, des secrets d’Etat touchant à la sécurité du pays divulgués sur la place publique, ou encore des intrusions sans vergogne dans l’intimité de personnes connues, en vertu du slogan : « tout le monde a le droit de tout savoir ». Mais c’est un slogan faux, fruit d’une époque fausse ; d’une bien plus grande valeur est ce droit confisqué, le droit des hommes de ne pas savoir, de ne pas voir leur âme divine étouffée sous les ragots, les stupidités, les paroles vaines. Une personne qui mène une vie pleine de travail et de sens n’a absolument pas besoin de ce flot pesant et incessant d’information. (…) Autre chose ne manquera pas de surprendre un observateur venu de l’Est totalitaire, avec sa presse rigoureusement univoque : on découvre un courant général d’idées privilégiées au sein de la presse occidentale dans son ensemble, une sorte d’esprit du temps, fait de critères de jugement reconnus par tous, d’intérêts communs, la somme de tout cela donnant le sentiment non d’une compétition mais d’une uniformité. Il existe peut-être une liberté sans limite pour la presse, mais certainement pas pour le lecteur : les journaux ne font que transmettre avec énergie et emphase toutes ces opinions qui ne vont pas trop ouvertement contredire ce courant dominant.

Extraits du discours d'Alexandre Soljénitsyne à Harvard, le 8 juin 1978
À la lecture de la presse, on se dit que les propos de Soljénitsyne sont probablement plus proches de la vérité que d'un pessimisme exagéré. Quand un journal a pour première nécessité de faire du chiffre, il se doit d'être lisible par un maximum de lecteurs potentiels, ce qui revient en d'autres termes à descendre au niveau du plus imbécile d'entre eux. Au vu de l'engouement que suscitent des reality shows d'une stupidité atterrante, je me dis qu'il ne faut pas espérer de quelconques changements positifs dans un futur proche.

dimanche 30 mars 2008

Croyance et athéisme

On présente souvent l'athéisme comme la croyance en la non-existence de Dieu. Ce n'est évidemment pas faux ; cependant lorsque l'on reconnaît généralement que la non-existence de Dieu ne peut être prouvée et ainsi tenue pour certaine, on part cependant du principe que la véridicité de la réalité que l'on appréhende est un fait. En d'autres termes, la démarche athée consiste à prendre acte de l'existence du monde extérieur et de rejeter comme spéculation l'existence de Dieu. Si la réalité de l'univers est certaine, nous n'avons en revanche aucune information sur sa nature (chose que je sous-entendais dans un précédent article à propos de l'identité). Qu'est-ce à dire ? Toutes nos connaissances nous sont transmises par nos sens, hors nous n'avons aucune information sur la source de ces informations. Le sujet a déjà été abordé de nombreuses fois par des auteurs de science-fiction de même que par des philosophes. Prétendre que Dieu n'existe pas, c'est penser que l'univers se suffit à lui-même, ce qui est un acte de foi. Pour être plus clair, ce n'est pas seulement l'idée de la non-existence de Dieu qui relève par nature de la croyance -- ce ne serait qu'une évidence que de souligner cela -- mais également l'idée que l'univers est "vrai", dans le sens où il ne pourrait être une illusion cachant quelque chose de plus profond. C'est fondamentalement la raison pour laquelle les caricatures telles que celle de la "licorne rose invisible" n'ont aucun sens : s'interroger sur l'existence de Dieu, c'est immanquablement s'interroger sur la nature de l'univers que nous appréhendons.

mercredi 31 octobre 2007

Quelques modestes notes à propos de l'identité

Radieux, le nouveau recueil de nouvelles de l'auteur de science-fiction Greg Egan, vient tout juste de paraître. Pour être honnête, je ne l'ai pas encore lu mais il semble évoquer la question de l'identité, thème récurrent de ses écrits, déjà entre autres abordé dans la Cité des Permutants, livre que je citerai d'ailleurs à nouveau dans un futur proche. Ces réflexions rejoignent celles du philosophe Hilary Putnam, qui formulait l'hypothèse du "cerveau dans la cuve", selon laquelle notre cerveau pourrait bien être plongé dans une cuve afin d'être maintenu en vie, tout en étant connecté à un ordinateur nous délivrant des informations via nos sens. La réalité que l'on appréhenderait serait alors un mensonge, si l'hypothèse en question, bien entendu, s'avérait juste.

Cela semble évident, si ce n'est que nous ne savons absolument pas si nous disposons ou non d'un cerveau. Si la réalité que nous appréhendons est fausse, nous sommes bien incapables, en effet, de déterminer si nous ne sommes réellement qu'un assemblage de cellules et notamment de neurones, dans la mesure où c'est bel et bien par l'intermédiaire de nos sens que nous pensons l'être. Le "cerveau dans la cuve" de Putnam pourrait bien être tout autre chose.