tag:blogger.com,1999:blog-6864012403771476062024-03-12T19:23:19.482-07:00Fors l'honneurPenser, c'est être à la recherche d'un promontoire. - MontaigneGuillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.comBlogger32125tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-21961278590232372622012-08-12T07:42:00.001-07:002012-08-12T07:42:15.567-07:00Pensée du jour, XI<blockquote class="tr_bq" style="text-align: justify;">
L'intérêt du <i>Vallon</i>, ceci étant dit, était ailleurs. Il ne se situait même pas dans l'ambitieux personnage d'Henrietta, le sculpteur, à travers laquelle Agatha Christie avait cherché à représenter [...] la souffrance spécifique qui s'attache au fait d'être artiste : cette incapacité à être <i>vraiment </i>heureuse ou malheureuse ; à ressentir <i>vraiment </i>la haine, le désespoir, l'exultation ou l'amour ; cette espèce de filtre esthétique qui s'interposait, sans rémission possible, entre l'artiste et le monde.</blockquote>
<div style="text-align: right;">
Michel Houellebecq, <i>Plateforme</i>, Flammarion, 2001, p. 98</div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-53217955378981060212012-01-29T10:29:00.000-08:002012-01-29T14:23:23.494-08:00Pensée du jour, X<blockquote class="tr_bq" style="text-align: justify;">
Dans cette très lumineuse Ténèbre, puissions-nous entrer nous-mêmes, et, par la non-vue et l'inconnaissance, puissions-nous voir et connaître ce qui est au-delà de toute vision et connaissance, par le fait même de ne rien voir ni rien connaître. Car c'est là véritablement voir et connaître et célébrer suressentiellement le Suressentiel lorsque l'on fait abstraction de tout ce qui existe. Tout comme ces artistes, lorsqu'ils façonnent une statue, retranchent tout ce qui masque la pure vision de la forme qui s'y dissimule, c'est par ce seul dépouillement qu'ils font apparaître la beauté latente.</blockquote>
<div style="text-align: right;">
Denys l'Aréopagite, <i><a href="http://fr.wikisource.org/wiki/Trait%C3%A9_de_la_th%C3%A9ologie_mystique">Traité de la théologie mystique</a></i>, trad. de l'abbé Darboy (1845), §2</div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-84458601116461024842012-01-22T14:31:00.000-08:002012-01-22T14:31:35.300-08:00Henry Miller sur le temps libre<blockquote class="tr_bq" style="text-align: justify;">
Il y a, et il y a toujours eu, quelques rares individus qui n'ont plus besoin de livres, fût-ce de livres « sacrés ». Et ce sont précisément les gens éclairés, éveillés. [...] Ils ne cherchent pas à remplir leur esprit de connaissance, mais de sagesse. [...] Ces hommes là ne sont jamais pressés, ils ne sont jamais trop occupés pour répondre à un appel. Le problème du temps n'existe pas pour eux, tout simplement. Ils vivent dans l'instant et ils se rendent compte que chaque instant est une éternité. Tout autre type d'individu que nous connaissons fixe des limites à son temps « libre ». Ces hommes exceptionnels n'ont rien d'autre que du temps libre.</blockquote>
<div style="text-align: right;">
Henry Miller, <i>Lire aux cabinets</i>, Gallimard, 1957, p. 76-78</div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-48613677497915698592012-01-11T11:04:00.000-08:002012-01-22T14:38:01.900-08:00Pensée du jour, IX<blockquote class="tr_bq">
<div style="text-align: justify;">
Que veux-je dire, Seigneur mon Dieu, sinon que j'ignore d'où je suis venu ici-bas, en cette vie. Dois-je la nommer une vie mortelle, ou plutôt une mort vivante ?</div>
</blockquote>
<div style="text-align: right;">
Saint Augustin, <i>Les Confessions</i>, Livre I, ch.VI</div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-60336129671290114852011-12-04T12:55:00.000-08:002011-12-04T13:40:31.339-08:00Partir en exil sur une île déserte<div style="text-align: justify;">Parfois, on se prend à rêver d'une vie sauvage, loin du bruit et des tracas de la vie quotidienne. C'est alors que je me suis mis à la recherche des derniers a<i style="text-align: left; ">illeurs</i><span class="Apple-style-span" style="text-align: left; ">, totalement dépourvus ou presque de présence humaine. Aux confins de l'hémisphère sud, baignée dans les eaux froides de l'océan Austral, la </span><a href="http://en.wikipedia.org/wiki/South_Georgia_and_the_South_Sandwich_Islands" style="text-align: left; ">Géorgie du Sud</a><span class="Apple-style-span" style="text-align: left; "> pourrait être le lieu idéal pour qui v</span><span class="Apple-style-span" style="text-align: left; ">eut s'isoler, à l'instar des </span><a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Auckland_Islands" style="text-align: left; ">îles Auckland</a><span class="Apple-style-span" style="text-align: left; ">, proches de la Nouvelle-Zélande et déjà plus hospitalières. À la réflexion, s'il s'agit de faire de ce rêve une réalité, certaines îles des </span><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/A%C3%A7ores" style="text-align: left; ">Açores</a><span class="Apple-style-span" style="text-align: left; ">, comme l'</span><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Corvo_(%C3%AEle)" style="text-align: left; ">île du Corbeau</a><span class="Apple-style-span" style="text-align: left; ">, sont déjà plus intéressantes : elle sont plus accessibles et surtout parfaitement habitables.</span></div><div style="text-align: justify;"><span class="Apple-style-span" style="text-align: left; "><br /></span></div><div><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;width: 320px; height: 191px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiGi5XbA_js5KO88Io5Bqg2-fZlkmXJ_Y2Os3_QRbXHO5Lsvj9tyzXirYTbPIZVSSr3AdDoj0W5sljHbk644nNc51g-tMGAyDxrAfqx-3occrvEQO3Er8oFZ3255iyYPGh7jJr3emLcqQg/s320/Carnley_Harbour1.preview.jpg" border="0" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5682390915731573954" /><div style="text-align: justify;">Outre les Açores, qui sont un pis-aller puisque habitées, il existe une solution plus satisfaisante encore - mais plus onéreuse - pour qui veut se retrouver seul au milieu de l'océan. Comme Tom Hanks dans <i style="text-align: justify; ">Seul au monde</i><span class="Apple-style-span" style="text-align: justify; ">, mais certainement avec plus de confort, vous pouvez devenir propriétaire d'un petit bout de terre perdu au milieu de nulle part. Sur la Toile, les vendeurs d'îles privées abondent, à l'exemple de </span><a href="http://www.privateislandsonline.com/" style="text-align: justify; ">Private Islands Online</a><span class="Apple-style-span" style="text-align: justify; "> ou de </span><a href="http://www.vladi-private-islands.de/tunnel.html" style="text-align: justify; ">Vladi</a><span class="Apple-style-span" style="text-align: justify; ">, qui proposent un véritable catalogue d'îles désertes, situées sur tous les continents. D'autres sites, comme </span><a href="http://www.privateislandsblog.com/" style="text-align: justify; ">The Private Islands Blog</a><span class="Apple-style-span" style="text-align: justify; ">, prodiguent des conseils et des informations pour tout intéressé.</span></div></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-90115604453115360992011-08-05T10:53:00.000-07:002011-08-05T11:11:52.842-07:00Platon sur l'amour, l'identité et l'immortalité<div style="text-align: justify;"><blockquote>En effet, même dans ce que l'on appelle la vie individuelle de chaque vivant et dans son identité (c'est ainsi que, depuis sa petite enfance jusqu'à ce qu'il soit devenu vieux, on dit qu'il est la même personne), oui, cet être-là, quoi qu'en lui il n'ait jamais les mêmes choses, on l'appelle néanmoins le même, et cependant, tout en faisant des pertes, il se renouvelle incessamment, dans sa chevelure, dans sa chair, dans ses os, dans son sang et, d'une façon générale, dans tout son corps. Et ce n'est pas seulement dans son corps, mais ce sont aussi, selon l'âme, ses manières d'être, son caractère, ses opinions, ses désirs, ses joies et ses peines, ses craintes, c'est chacun de ces éléments qui, pour chacun de nous, ne se présente jamais identique à ce qu'il était ; il y en a, au contraire, qui viennent à l'existence ; il y en a d'autres qui se perdent.<br /><br />Or, ce qu'il y a de plus déconcertant encore que tout cela, c'est que, même en ce qui concerne les connaissances, non seulement il y en ait qui viennent pour nous à l'existence, et d'autres qui se perdent, et que nous ne soyons jamais non plus les mêmes dans l'ordre de nos connaissances, mais c'est aussi que chacune des connaissances subit elle-même un sort identique ! Ce qu'on appelle en effet étudier implique une évasion de la connaissance ; car l'oubli, c'est une connaissance qui s'évade, tandis qu'inversement l'étude, remplaçant la connaissance qui s'en va par un souvenir tout neuf, sauvegarde si bien la connaissance qu'on la juge être la même !<br /><br />C'est de cette façon, sache-le, qu'est sauvegardé tout ce qui est mortel ; non point, comme ce qui est divin, par l'identité absolue d'une existence éternelle, mais par le fait que ce qui s'en va, miné par son ancienneté, laisse après lui autre chose, du nouveau qui est pareil à ce qu'il était. C'est par ce moyen, dit-elle, que ce qui est mortel, Socrate, participe à l'immortalité, dans son corps et dans tout le reste. [...] Donc, ne t'émerveille pas que ce qui est une repousse de lui-même, chaque être ait pour lui tant de sollicitude naturelle, car c'est en vue de l'immortalité que font cortège à chacun d'eux ce zèle et cet amour !</blockquote></div><div style="text-align: right;">Platon, <span style="font-style: italic;">Le Banquet</span><br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-60653583607431601502011-07-25T07:20:00.000-07:002011-12-04T09:43:14.593-08:00Pensée du jour, VIII<div style="text-align: right;"><blockquote><div style="text-align: justify;">Contrairement à ce que l’on croit habituellement, c’est la créature d’élite et non la masse qui vit « essentiellement » dans la servitude. Sa vie lui paraît sans but s’il ne la consacre au service de quelques obligations supérieures. Aussi la nécessité de servir ne lui apparaît pas comme une oppression, mais au contraire, lorsque cette nécessité lui fait défaut, il se sent inquiet, et invente de nouvelles règles plus difficiles, plus exigeantes, qui l’oppriment. Telle est la vie-discipline, la vie noble. La noblesse se définit par l’exigence, par les obligations, non par les droits. Noblesse oblige.<br /></div><div style="text-align: left;"><blockquote>Vivre à son gré est plébéien ; le noble aspire à l’ordre et à la loi (Goethe)<br /></blockquote></div><div style="text-align: justify;">Les privilèges de la noblesse ne sont pas, à l’origine tout du moins, des concessions ou des faveurs, mais des conquêtes. Et, en principe, leur maintien suppose que le privilégié devrait être capable de les reconquérir à tout instant, si cela était nécessaire, ou si quelqu’un les lui disputait.</div></blockquote>José Ortega y Gasset, <span style="font-style: italic;">La révolte des masses</span> (1929)<br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-14058950781441208152011-04-13T11:44:00.000-07:002011-07-26T10:35:29.616-07:00Pensée du jour, VII<div style="text-align: justify;"><blockquote>Cette fondation fut le dernier symbole auquel condescendirent les Immortels ; il marque l'étape, où, comprenant la vanité de toute entreprise, ils décidèrent de vivre dans la pensée, dans la pure spéculation. Ils élevèrent la construction, l'oublièrent et allèrent se terrer dans les crevasses. Absorbés, ils percevaient à peine le monde physique.</blockquote><div style="text-align: right;">Jorge Luis Borges, <span style="font-style: italic;">L'immortel</span></div><div style="text-align: right;"> </div></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-76027061583235294612010-09-13T12:59:00.000-07:002010-09-13T13:07:37.192-07:00Psychologie des foules<div style="text-align: justify;"></div><blockquote><div style="text-align: justify;">Cependant, une expérience très simple qu'Erich von Holst a faite autrefois avec des vairons, nous montre que ce point de vue ne se justifie guère. Von Holst enleva à l'un de ces petits poissons la partie antérieure du cerveau, siège - chez ces poissons du moins - de toutes les réactions assurant la cohésion de l'essaim. Le vairon ainsi opéré voit, mange et nage comme ses congénères normaux. La seule propriété qui l'en distingue c'est qu'il lui est parfaitement indifférent de perdre son essaim, sans qu'aucun de ses compagnons le suive. Ce qui lui manque, c'est cette hésitation et inquiétude que montre un poisson normal qui, bien que désirant intensément nager dans une direction choisie, se retourne pourtant après quelques mouvements vers les autres membres du groupe et se laisse influencer par le fait qu'ils le suivent ou non. Au poisson décérébré par von Holst, tout cela était parfaitement égal. S'il apercevait de la nourriture ou pour n'importe quelle autre raison, il se mettait délibérément en marche, et voilà que tout l'essaim le suivait. Grâce à son infirmité, l'animal opéré était devenu le chef incontesté !<br /></div></blockquote><div style="text-align: right;">Konrad Lorenz, <span style="font-style: italic;">L'agression</span><br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-54476978517008186832010-08-04T21:11:00.000-07:002011-11-20T12:31:46.448-08:00Science, Politics and Gnosticism de Eric Voegelin<div style="text-align: justify;">Le philosophe canadien Eric Voegelin apporte un éclairage original sur la modernité. La modernité, selon lui, est influencée en profondeur par un gnosticisme d'un genre nouveau dont la filiation avec les diverses sectes antiques serait directe. La lecture de son essai intitulé <em>Science, Politics and Gnosticism </em>ainsi que de quelques uns de ses autres écrits - tous regroupés dans l'ouvrage édité par <a href="http://www.isi.org/books/">ISI Books</a> - permet une vue d'ensemble de sa pensée, que je m'autorise à résumer trop rapidement dans les quelques lignes qui suivent.<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgKS6_l-oNr-v-s-fAPlUYyFEoH6d4Rlrsx2-X5SPhyphenhypheniK85rDMvsBps3fqm28zxOCdXKMmZFztbCjiVq98suwX6dCkKQgbUcDnOr7ziUhcJuEIOJS4SbeSq-g1Z-dgcOFORztZshsQQy6o/s1600/chuteicare.jpg"><img style="display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center; cursor: pointer; width: 320px; height: 178px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgKS6_l-oNr-v-s-fAPlUYyFEoH6d4Rlrsx2-X5SPhyphenhypheniK85rDMvsBps3fqm28zxOCdXKMmZFztbCjiVq98suwX6dCkKQgbUcDnOr7ziUhcJuEIOJS4SbeSq-g1Z-dgcOFORztZshsQQy6o/s320/chuteicare.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5499044846226132274" border="0" /></a>L'auteur dessine au commencement de son œuvre la limite à tracer entre philosophie et <span style="font-style: italic;">doxa</span>, brouillée selon lui dans notre ère moderne. La philosophie politique, fondée par Platon et Aristote, se construit ainsi sur l'idée d'une vérité accessible au-delà des opinions subjectives (<span style="font-style: italic;">doxa</span>), ce qui suppose que l'on puisse questionner les prémisses sur lesquelles se fondent ces dernières. La situation de la philosophie politique dans nos sociétés modernes a cependant changé du tout au tout, dans la mesure où la <span style="font-style: italic;">doxa </span>a supplanté et pris les habits de la philosophie, au moyen de ce que Voegelin nomme « l'interdiction des questions » : le penseur censure purement et simplement toute interrogation sur les fondements de son raisonnement. Les exemples sont multiples, que ce soit chez Hegel, Marx ou Nietzsche. Les écrits du jeune Marx en offrent notamment un exemple assez édifiant ; à la question de l'origine de l'homme, dont dépend la stabilité de son édifice idéologique, entièrement bâti sur l'idée d'une création de l'homme par lui-même, Marx répond simplement qu'une telle question est une « impossibilité pratique [...] pour l'homme socialiste ».</div><div><br /><div style="text-align: justify;">En censurant toute contradiction pertinente, les auteurs en question travestissent la philosophie en <span style="font-style: italic;">doxa</span>, c'est-à-dire en gnose. En lieu et place d'une construction imparfaite, le penseur gnostique bâtit une pure spéculation intellectuelle présentée comme une connaissance définitive. Voegelin perçoit dans ce procédé un rapport avec le gnosticisme ancien : la réalité doit être écartée car le monde est fondamentalement mauvais, créé par un démiurge malfaisant dans le but de piéger et d'enfermer l'homme. L'être humain goûte enfin la connaissance des choses que lui offre le serpent, libérateur méconnu d'une humanité volontairement maintenue dans l'ignorance par le dieu stupide et mauvais de la <span style="font-style: italic;">Genèse</span>.<br /><br />La perversion de la philosophie en gnose est explicitement entreprise dans la <span style="font-style: italic;">Phänomenologie</span> de Hegel. Alors que la philosophie prétend s'approcher de la connaissance - d'où l'amour (<span style="font-style: italic;">philo</span>) de la connaissance (<span style="font-style: italic;">sophia</span>) - la gnose hégélienne revendique la possession de la connaissance elle-même (<span style="font-style: italic;">gnosis</span>). Ce n'est qu'au prix d'un jeu de mots que le penseur allemand présente son système sous le nom de philosophie et de science. La prétention au savoir absolu, irrationnelle en ce qu'elle est impossible, se fonde en réalité sur un sentiment de révolte contre le monde et son créateur. Le penseur gnostique, dans sa volonté de transformer l'ordre des choses, doit d'abord tuer Dieu afin de rendre son projet à la portée du surhomme qui vient. Ainsi, dans les plus fameuses pages du <span style="font-style: italic;">Gai savoir</span>, la divinité que recherche Nietzsche une lanterne à la main n'est pas le Dieu mort sinon le surhomme à venir. Le fait est pourtant que l'on ne peut transformer l'homme sans le détruire ; c'est pourquoi à la mort de Dieu ne peut suivre que la mort de l'homme.<br /><br />Voegelin étudie avec précision dans <em>Ersatz religion</em> les mouvements gnostiques modernes, dont les principes découlent à la source de la perversion de l'idée chrétienne de perfection. Si l'idéal chrétien ne peut être atteint que dans l'au-delà, les gnostiques modernes vont au contraire le rendre immanent, c'est-à-dire tenter de le réaliser au cours même de l'histoire humaine.<br /><br /></div></div><div style="text-align: justify;">La poursuite de l'idéal de perfection comprend deux composantes, l'une téléologique - puisqu'il s'agit d'atteindre un but - et l'autre axiologique - en ce que ce but est considéré comme le plus grand. Les mouvements gnostiques modernes donnent plus ou moins d'importance à l'un et à l'autre : certains, à l'instar du progressisme de Kant ou de Condorcet, s'attachent aux moyens de parvenir à un état de perfection, sans avoir une compréhension nécessairement claire de cet ultime but ; d'autres, à l'exemple des courants utopistes, se concentrent plutôt sur la définition même du monde parfait. Thomas More, dans son <span style="font-style: italic;">Utopie</span>, dresse ainsi les plans d'une cité idéale dont la réalisation ne pourrait être concrétisée qu'à condition d'ignorer l'orgueil (<span style="font-style: italic;">superbia</span>) des hommes, pourtant profondément inscrit en leurs cœurs - ce dont l'humaniste anglais, au contraire d'autres, était certes conscient. Dans le dernier cas, que Voegelin nomme "mysticisme actif", une importance est également conférée aux deux aspects téléologique et axiologique, alors tous deux rendus immanents. Comte et Marx appartiennent à cette catégorie, en décrivant à la fois avec précision le monde parfait et les moyens de l'atteindre.<br /></div><div style="text-align: justify;"><br />Le gnosticisme moderne trouve également ses racines dans la pensée de Joachim de Flore, découpant l'histoire en trois âges et annonçant la venue d'un âge de l'Esprit, post-chrétien et supérieur en ce qu'il suit et dépasse un âge du Fils débuté avec la mort du Christ. La progression de l'humanité vers un âge idéal, le mythe d'un troisième monde et l'annonce prophétique d'un monde nouveau se retrouvent ainsi dans tous les mouvements gnostiques modernes, dont le but premier reste de détruire le monde tel qu'il est pour en bâtir un idéal.<br /><br />Un tel projet, s'il est considéré comme à la portée de l'homme, ne peut en réalité l'être en aucun cas ; le penseur gnostique ne peut construire son système qu'en présentant une vision faussée de la réalité, purgée de ce qui fait barrage à la construction du monde nouveau qu'il appelle de ses vœux. La constatation de ce simple fait amène Voegelin à rechercher les causes de cette omission volontaire sur le plan psychologique. Le fait traduit selon lui une insatisfaction profonde vis-à-vis de nos connaissances sur nous-mêmes et sur le monde, nécessairement partielles et contestables. A toute vérité incertaine, le gnostique préfère une contre-vérité certaine, ayant l'apparence de la sûreté et de la stabilité.<br /></div><div></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-1833602167806617542010-07-30T12:50:00.000-07:002011-04-13T12:19:53.069-07:00Pensée du jour, VI<div style="text-align: justify;"><blockquote>Beaucoup de maîtres prônent l'amour comme ce qui est le plus haut, tel saint Paul quand il dit : « Quelque tâche que j'entreprenne, si je n'ai pas l'amour je ne suis rien ». Mais je mets le détachement encore au-dessus de l'amour. D'abord pour cette raison : le meilleur dans l'amour est qu'il m'oblige à aimer Dieu. Or c'est quelque chose de beaucoup plus important d'obliger Dieu à venir à moi que de m'obliger à aller à Dieu, et cela parce que ma béatitude éternelle repose sur ce que Dieu et moi devenions un.<br /><br />La seconde raison pour laquelle je mets le détachement au-dessus de l'amour est celle-ci : si l'amour m'amène au point de tout endurer pour Dieu, le détachement m'amène au point de n'être plus réceptif que pour Dieu.<br /><br />L'homme qui est complètement détaché est tellement ravi dans l'éternité que rien de passager ne peut plus l'amener à recevoir une sensation corporelle. Il est mort au monde parce que rien de terrestre ne lui dit plus rien. C'est cela que saint Paul avait en l'esprit quand il disait : « Je vis et ne vis pourtant pas. Le Christ vit en moi »</blockquote><div style="text-align: right;">Maître Eckhart, <a href="http://dieujesus.free.fr/detachement.htm"><span style="font-style: italic;">Du détachement</span></a> </div></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-54351921747265978022010-07-28T13:01:00.000-07:002011-11-20T12:30:02.710-08:00Rêves et composition musicale<div style="text-align: justify;">La sortie d'<span style="font-style: italic;">Inception</span> de Christopher Nolan - qu'il me reste d'ailleurs à voir - me paraît présenter une bonne occasion pour parler à nouveau de mes aventures oniriques et plus particulièrement de mes épisodes créatifs. J'ai déjà abordé le problème du rêve lucide et de la créativité en son sein dans un billet précédent, rapportant simplement une courte <a href="http://forslhonneur.blogspot.com/2009/10/leibniz-sur-la-creativite-onirique.html">réflexion de Leibniz</a> à ce propos. Le fait de se retrouver dans un environnement onirique qui semble de par sa complexité et son agencement avoir été pensé est toujours chose surprenante. Si la beauté des paysages et l'incroyable réalité des sensations peuvent nous étonner, plus surprenante est encore la création artistique - spécifiquement musicale - permise par les rêves lucides. Ces derniers ont beau être en soi déroutants, nous pouvons ceci étant facilement concevoir que le cerveau puisse recycler l'ensemble des images enregistrées dans notre mémoire depuis notre naissance, et ainsi nourrir nos rêves de villes, de paysages et de personnages inconnus.<br /><br /></div><div style="text-align: justify;"><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://www.janegifford.co.uk/"><img style="display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center; cursor: pointer; width: 320px; height: 223px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiG7slEa300Khj4mAo_mPMYgaLj9HiwNvEPk0v0MoFOdKw1-79pMNkvX0XJ6JOuIs6q63CaXh9vyhHs5G9r9hTYuCzs5BrnEH01_9ZBAuqDmEcwM5aQamNdzZC3uSo7nUk1bFPRAKVf5zw/s320/Dream-Painting1.gif" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5499060154375032594" border="0" /></a>Il est beaucoup plus difficile d'admettre que le cerveau puisse créer <span style="font-style: italic;">ex nihilo</span> de la musique. C'est pourtant l'expérience que j'ai faite. En réalité, deux cas de figure se sont présentés à moi au cours de mes voyages oniriques. Dans la première situation, j'étais simplement saisi d'une grande inspiration et composait avec aisance - je me suis même souvenu d'un air au réveil, rapidement oublié mais dont j'ai pu attester l'originalité. Dans la seconde situation, autrement plus étrange, mon rôle était purement passif ; la musique venait d'une source extérieure et habillait mon rêve comme la bande son d'un film, à l'instar de ces notes mystérieuses que percevait dans son agonie Ivan Lourine, le compositeur mourant dépeint par Dino Buzzati dans <span style="font-style: italic;">Duel à mort</span><span style="font-style: italic;"></span>. J'ai parfois été suffisamment conscient et réfléchi pour remarquer à quel point cette musique était complexe en plus d'être belle.<br /></div><div style="text-align: justify;"><br />La lecture de forums consacrés aux rêves lucides m'a appris que je n'étais évidemment pas le seul à avoir connu cette expérience. En outre, il n'est pas exact de circonscrire le phénomène aux seuls rêves lucides ; lors de la phase d'endormissement, ou dans les minutes qui suivent le réveil, quelque part entre rêve et réalité, notre aptitude à créer et à composer semble étrangement développée. Je ne me risquerais pas à apporter l'embryon d'une explication à ce curieux phénomène, mais on pourrait dire en tout cas que nos rêves lucides semblent parfois puiser dans les eaux d'une source intarissable.<br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-1416195708608712762010-04-15T14:45:00.000-07:002011-12-04T12:52:46.078-08:00Pensée du jour, V<div style="text-align: right;"><blockquote><div style="text-align: justify;">J’ai parlé en mon cœur, disant : Voici, je suis devenu grand et j’ai acquis de la sagesse plus que tous ceux qui ont été avant moi sur Jérusalem, et mon cœur a vu beaucoup de sagesse et de connaissance ; et j’ai appliqué mon cœur à la connaissance de la sagesse et à la connaissance des choses déraisonnables et de la folie. J’ai connu que cela aussi, c’est la poursuite du vent. Car à beaucoup de sagesse, beaucoup de chagrin ; et qui augmente la connaissance, augmente la douleur.</div></blockquote></div><div style="text-align: right;"><a href="http://fr.wikisource.org/wiki/Eccl%C3%A9siaste_-_Darby#Chapitre_1">Ecclésiaste</a>, 1:16-18<br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-90081361801423869462009-11-19T09:54:00.000-08:002011-12-04T13:41:05.320-08:00Tout est perdu, fors l'honneur<div style="text-align: justify;">Un petit mot sur l'expression qui sert de titre à ce modeste blog : <span style="text-align: justify; font-style: italic; ">tout est perdu, fors l'honneur</span><span class="Apple-style-span" style="text-align: justify; "> serait la phrase qu'aurait prononcé François Ier à la suite de la défaite de Pavie, où il subit des pertes écrasantes et fut prisonnier par les Espagnols. Démuni et battu, le roi de France signifiait ainsi qu'il ne lui restait que son honneur.</span></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-73805831826328031922009-10-29T15:17:00.000-07:002009-10-29T15:25:00.675-07:00Leibniz sur la créativité onirique<div style="text-align: justify;"><blockquote>Pour ne rien dire des merveilles des songes, où nous inventons sans peine, et sans en avoir même la volonté, des choses auxquelles il faudrait penser longtemps pour les trouver quand on veille, notre âme est architectonique encore dans les actions volontaires, et, découvrant les sciences suivant lesquelles Dieu a réglé les choses <span style="font-style: italic;">pondere</span>, <span style="font-style: italic;">mensura</span>, <span style="font-style: italic;">numero</span>, elle imite dans son département et dans son petit monde, où il lui est permis de s'exercer, ce que Dieu fait dans le grand. </blockquote><div style="text-align: right;">G. W. Leibniz, <span style="font-style: italic;">Principes de la nature et de la grâce</span>, §14<br /></div></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-56066360894352421792009-05-09T09:27:00.000-07:002009-05-09T09:34:33.561-07:00Pensée du jour, IV<div style="text-align: justify;"></div><blockquote><div style="text-align: justify;">Les hommes bons désirent naturellement savoir. Je sais que nombreux sont ceux qui diront que c'est là œuvre inutile. Ce seront ceux dont Démétrios a dit que le courant d'air qui est cause des mots se formant dans leur bouche ne mérite pas davantage d'attention que cet autre vent, qui sort par l'autre côté de leur corps. Des hommes qui n'ont désir que de richesses et de jouissances corporelles, et sont entièrement dépourvus du goût de la connaissance, véritable nourriture et richesse de l'âme ; car si l'âme est plus digne que le corps, alors de la même façon les richesses de l'âme seront plus dignes que celles du corps. Et souvent, quand je vois un de ceux-là prendre en main une oeuvre de connaissance, je m'attends à le voir la porter comme un singe à son nez, ou à l'entendre me demander si ça se mange.<br /></div></blockquote><br /><div style="text-align: right;">Léonard de Vinci, cité in <span style="font-style: italic;">Léonard de Vinci, maximes, fables & devinettes</span>, Arléa, Paris, 2002<br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-33960074052876004172009-03-23T15:59:00.000-07:002009-03-31T16:18:02.530-07:00Paul Valéry et l'étonnement<div style="text-align: justify;"><blockquote>Entre la netteté de la vie et la simplicité de la mort, les rêves, les malaises, les extases, tous ces états à demi impossibles, qui introduisent, dirait-on, des valeurs approchées, des solutions irrationnelles ou transcendantes dans l'équation de la connaissance, placent d'étranges degrés, des variétés et des phases ineffables, – car il n'est point de noms pour des choses parmi lesquelles on est bien seul.<br />Nous portons en nous des formes de la sensibilité qui ne peuvent pas réussir, mais qui peuvent naître. Ce sont des instants dérobés à la critique implacable de la durée ; ils ne résistent pas au fonctionnement complet de notre être : ou nous périssons, ou ils se dissolvent. Mais ce sont des monstres pleins de leçons que ces monstres de l'entendement, et que ces états de passage, – espaces dans lesquels la continuité, la connexion, la mobilité connues sont altérées ; empires où la lumière est associée à la douleur ; champs de forces où les craintes et les désirs orientés nous assignent d'étranges circuits ; matière qui est faite de temps ; abîmes littéralement d'horreur, ou d'amour, ou de quiétude ; régions bizarrement soudées à elles-mêmes, domaines non-archimédiens qui défient le mouvement ; sites perpétuels dans un éclair ; surfaces qui se creusent, conjuguées à notre nausée, infléchies sous nos moindres intentions... On ne peut pas dire qu'ils sont réels ; on ne peut pas dire qu'ils ne le sont pas. Qui ne les a pas traversés ne connaît pas le prix de la lumière naturelle et du milieu le plus banal ; il ne connaît pas la véritable fragilité du monde, qui ne se rapporte pas à l'alternative de l'être et du non-être ; ce serait trop simple ! – L'étonnement, ce n'est pas que les choses soient ; c'est qu'elles soient <span style="font-style: italic;">telles</span>, et non telles autres. La <span style="font-style: italic;">figure de ce monde</span> fait partie d'une famille de figures dont nous possédons sans le savoir tous les éléments du groupe infini. C'est le secret des inventeurs.<br /></blockquote><div style="text-align: right;">Paul Valéry, <span style="font-style: italic;">Introduction à la méthode de Léonard de Vinci</span>, « Note et digression » (1919)<br /></div><p></p> Lorsque notre conscience est altérée, lorsque nous sommes pris de fatigue, ou lorsque nous sommes encore plongés dans un état de demi-sommeil, à cheval entre le rêve et la réalité, on manifeste cet étonnement auquel Paul Valéry fait référence dans cet extrait. La réalité semble étrange ; le monde s'enquiert subitement d'un intérêt dont il était jusque-là dépourvu. On prend conscience que les choses auraient pu être bien différentes de ce qu'elles sont ; on se demande pourquoi elles sont ce qu'elles sont.</div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-23419894436886826632009-03-13T14:56:00.000-07:002009-03-13T16:10:48.922-07:00Du paganisme contemporain<div style="text-align: justify;">L'actualité récente est une triste fresque d'événements tragiques, notamment en matière de massacres sanglants. Le dernier en date s'est produit en Allemagne, dans la petite ville de Winnenden. Un jeune adolescent de 17 ans, <a href="http://www.liberation.fr/monde/0101555043-massacre-de-winnenden-tim-avait-beaucoup-change">Tim Krestchmer, a ouvert le feu sur quinze personnes</a>, les tuant toutes sur le coup. La fascination qu'exercent de tels massacres sur l'opinion s'explique certes, fort normalement, en raison de leur caractère aussi bien choquant qu'imprévu, sinon incompréhensible. Je me risque cependant à soumettre une autre hypothèse, quelque peu aventureuse et risquée mais qui a le mérite, à mon sens, de soulever certaines questions dignes d'intérêt.<br /></div><div style="text-align: justify;"><br />Il faut tout d'abord considérer les circonstances dans lesquelles s'est déroulé le drame. Les motivations du jeune meurtrier sont curieusement proches de celles manifestées par d'autres individus en des lieux différents. Dans le cas qui nous occupe, Tim Krestchmer, on suppose à la suite d'une déception amoureuse, s'en est presque exclusivement pris aux filles et femmes de son collège. Lors de la fusillade de Virginia Tech, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Cho_Seung-hui">Cho Seung-hui</a> fait feu sur ses camarades, ces « gosses de riche » faisant honteusement preuve de « débauche ». Dans un cas comme dans l'autre, l'envie et le ressentiment – qui marchent de pair, disait Nietzsche – dictent ces conduites abominables. La même logique implacable s'impose dans les deux cas, en dépit de circonstances dissemblables en surface : les filles trucidées par Tim comme les étudiants morts sous les balles de Cho ne font rien d'autre que représenter la ou les personnes nourrissant l'envie des deux meurtriers – une personne aimée dans le premier cas, probablement ; des camarades heureux et oisifs dans le second. En outre, le monde entier devient de même rapidement témoin de l'acte, les médias se faisant l'écho du dramatique événement.<br /></div><br /><div style="text-align: justify;">Ces schémas sont semblables aux sacrifices païens antiques dont les mécanismes ont été décortiqués par René Girard dans <span style="font-style: italic;">La violence et le sacré</span> : une victime expiatoire est condamnée sous les yeux de la multitude, laquelle se décharge ainsi en quelque sorte de la violence qu'elle contient et qui la mine. La victime est le symbole de toutes les haines et de toutes les envies, remplace tous les ennemis comme tous les adversaires. Par sa mort, la société est protégée de la désagrégation violente. Le christianisme, par l'imitation du modèle christique, met fin au sacrifice comme mode de régulation des rapports sociaux. Dans le cas présent, on peut se demander si les victimes de Tim ou de Cho, plus que d'anonymes vies perdues, ne sont pas des êtres sacrifiés par et surtout pour la société dans son ensemble. Les corps des victimes, les circonstances du drame, l'horreur de l'acte sont exposés à la vue de tous, en étant repris et diffusés dans les médias du monde entier. Sous les apitoiements de circonstance, sous les regards déplorés de la multitude se cachent peut-être l'attrait et la fascination malsains pour une violence dirigée contre l'ennemi que l'on envie, qu'il s'agisse de filles ou de riches en l'occurrence, ou plus simplement de notre voisin, de notre frère ou de nos collègues.<br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-72494837498835445572009-02-17T12:19:00.000-08:002009-02-18T14:32:11.677-08:00Le dernier homme<div style="text-align: justify;">J'ai toujours ressenti, au contact des mouvements de jeunes gens <span style="font-style: italic;">en lutte</span>, un curieux sentiment mêlé de pitié et de dédain, quelque soit le motif de leur prétendu combat. Ces hordes aux cheveux gras n'inspirent que le dégoût. La laideur y côtoie la grossièreté, le rebelle déjà vieux traîne malaisément son pathos parmi les jeunes moutons perdus, fiers d'un futur diplôme déjà troué de corrosives grèves à répétition. Le motif de leur lutte importe peu. Quelque soit le prétexte, la horde braille invariablement des slogans idiots dégorgés dans une langue corrompue, réceptacles fétides de vagues idées germant quelque part, au fond des circonvolutions de leurs cerveaux malades.<br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-49053383842329770442009-01-16T11:08:00.000-08:002009-01-16T11:44:36.171-08:00Induire des rêves lucides, II<div style="text-align: justify;">A la suite d'un <a href="http://forslhonneur.blogspot.com/2008/12/induire-des-rves-lucides.html">post précédent</a> portant sur les méthodes d'induction de rêve lucide, je confirme par une nouvelle expérience la validité de l'autosuggestion et de la "concentration" telle que je l'ai précédemment définie. J'ai en effet tenté de m'endormir une nouvelle fois (avant une sieste) avec la volonté d'entrer dans un rêve lucide. Bien que cela n'ait pas fonctionné, j'ai néanmoins pu expérimenter ce qui semble être un début de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Paralysie_du_sommeil">paralysie du sommeil</a>.<br /><br />La paralysie a duré en tout et pour tout quelque chose comme une trentaine de secondes. Je n'arrivais pas à ouvrir les yeux, je n'étais donc pas doté du sens de la vue. Une main m'a saisi au cou (j'imagine de par sa force et sa brutalité qu'il s'agissait d'une main d'homme) en forçant relativement fortement, sans pour autant que cela ne m'étouffe. En dépit de ma volonté, je ne pouvais pas bouger. L'expérience n'a cependant pas été choquante : je n'ai pas ressenti de douleur physique, ni de peur d'ailleurs. Je sais, de par la lecture de <a href="http://inconscient.fr/forum/">certains témoignages</a>, que le déroulement de la paralysie dépend grandement de notre état d'esprit du moment ; je me souviens même (sans succès) m'être concentré pour que la main qui s'attaquait à moi me lâche ou me masse le cou... J'en déduis que mon relatif détachement vis-à-vis de l'événement m'a évité une paralysie qui aurait pu être autrement plus pénible et effrayante, ce qu'elle est, semble-t-il, dans de nombreux cas.<br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-79247057617595614252008-12-25T15:22:00.000-08:002008-12-25T15:39:50.336-08:00Quelques scolies choisies de Nicolás Gómez Dávila<div style="text-align: justify;">Joyeuses fêtes à tous ! Voici quelques pensées en guise de cadeau.<br /><blockquote>L'univers est important s'il est apparence, insignifiant s'il est réalité.<br /><br />Nous ne sommes pas la somme de nos actes. Nous sommes l'intégrité de notre cristal secret, ou sa plus secrète fêlure.<br /><br />Au fin fond du labyrinthe de notre âme grogne un singe apeuré.<br /><br />Les plaisirs qui nous comblent sont avant tout ceux que souvent nous laissons innomés tant ils sont humbles.<br /><br />Les choses n'exhalent leur essence qu'entre les doigts crispés de la nostalgie ou du désir.<br /><br />Le monde où il vaudrait la peine de voyager n'existe plus que dans les vieux livres de voyage.<br /><br />L'homme traque le désir et ne capture que la nostalgie.<br /><br />Les palais se construisent avec les décombres des rêves.<br /></blockquote></div><br /><div style="text-align: right;"><span style="font-style: italic;">Le Réactionnaire authentique</span>, Nicolás Gómez Dávila</div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-75990630352574052492008-12-12T14:33:00.000-08:002008-12-13T10:06:47.129-08:00Pensée du jour, III<blockquote><div style="text-align: justify;">C'est le sentiment noble qui nous interdit de n'être que des jouisseurs de la vie. Ce sentiment se révolte contre toute espèce d'hédonisme. Nous devons nous acquitter de quelque chose en retour. - Mais la croyance fondamentale de la masse, c'est qu'il faut vivre pour rien, - c'est là sa <span style="font-style: italic;">vulgarité</span>.</div></blockquote><br /><div style="text-align: right;">Friedrich Nietzsche, <span style="font-style: italic;">Ainsi parlait Zarathoustra</span><br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-73838404327200196242008-12-07T03:48:00.000-08:002008-12-07T10:05:05.773-08:00Induire des rêves lucides<div style="text-align: justify;">Pour tous ceux intéressés par les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%AAve_lucide">voyages oniriques</a>, j'ai récemment fait l'expérience d'une technique permettant de les induire assez facilement. Il existe une variété de solutions pour amorcer un <a href="http://www.dreamviews.com/induction.php">rêve lucide</a>, mais la plus efficace dans mon cas revient à s'endormir progressivement en voulant, d'une part, atteindre un état de lucidité, tout en se concentrant, d'autre part, sur une image particulière (n'importe laquelle). A l'évidence, cette technique ne peut fonctionner la veille d'une longue nuit de sommeil ; les rêves lucides ne survenant qu'en période de sommeil paradoxal, ce n'est qu'au petit matin (avant de s'endormir à nouveau) ou avant une sieste par exemple qu'elle peut être efficace.<br /><br />Une fois entré dans le rêve lucide, il peut être difficile de maintenir la lucidité. Il est tout d'abord important de ne pas trop s'exciter, bien qu'il est vrai que ce soit difficile pour un débutant, tant l'expérience du rêve lucide peut être curieuse et déroutante. Lorsque l'on sent que la lucidité s'efface subitement, que l'on perd pied pour ainsi dire, j'utilise la même technique pour ma part que lors de l'endormissement : je me concentre sur une image, sur un détail (par exemple, ma montre, ou les caractères imprimés sur une feuille de papier) ce qui a pour effet de renforcer fortement et directement la lucidité.<br /><br />Je prodiguerai éventuellement d'autres conseils à ce propos au grès de mes futures expériences.<br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-42402746961551990702008-11-27T15:28:00.001-08:002008-11-28T15:10:42.794-08:00Le poids du passé<div style="text-align: justify;">Je me faisais hier la réflexion suivante : en quoi un passé peut-il être plus lourd à porter qu'un autre ? Le passé nous est inaccessible ; le seul passé qui demeure vit en nos souvenirs. Quelle différence fondamentale peut-il bien exister entre des souvenirs véritables, renvoyant à des faits réels, et des souvenirs imaginaires, créés de toute pièce par l'esprit humain ? Ce ne sont, dans un cas comme dans l'autre, que des images dans notre tête et c'est d'autant plus vrai que les souvenirs "véritables" eux-mêmes sont partiellement artificiels, de par les exagérations et les oublis qui les accompagnent.</div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-686401240377147606.post-36337134353219400962008-11-26T14:41:00.000-08:002008-12-07T05:54:36.590-08:00Pensée du jour, II<blockquote>Se faire des amis est un plaisir de bourgeois, se faire des ennemis un plaisir d'aristocrate.</blockquote><div style="text-align: right;">Henri de Montherlant<br /></div>Guillaumehttp://www.blogger.com/profile/00146083367082254801noreply@blogger.com1